Sommaires de recherche
Pourquoi avoir effectué cette étude?
Les policiers sont plus à risque de présenter des symptômes de troubles de santé mentale que le grand public. Le risque est encore plus grand chez les femmes dans les services de police : elles seraient 1,66 fois plus susceptibles que leurs collègues masculins de présenter un trouble de santé mentale.
La recherche a permis d’identifier des motifs plausibles de cette différence, notamment les facteurs de stress organisationnels propres aux femmes comme les préjugés sexistes, la discrimination et le harcèlement sexuel. Par conséquent, les hommes et les femmes policiers peuvent vivre différemment le stress lié au travail.
Le but de cette étude était d’étudier les expériences des agents et agentes de police en fonction du sexe. Les chercheurs visaient à identifier des similitudes et des différences dans les expériences de ces hommes et femmes.
Qu’est-ce que l’étude a accompli?
Les participants ont été recrutés par l’entremise de l’Association des chefs de police de la Saskatchewan. Une affiche et un descriptif de l’étude ont été transmis aux différents services de police. Huit hommes et neuf femmes ont été retenus et ont passé une entrevue, en personne ou au téléphone. Ces entrevues ont été enregistrées. Avant de les classer par thèmes, on a analysé et codé les enregistrements.
Qu’a-t-on découvert?
- Les agents de police, hommes et femmes, disent subir des préjugés sexistes dans le cadre de leur travail.
- Toutes les participantes reconnaissent avoir été victimes d’une forme de discrimination fondée sur le sexe ou de harcèlement sexuel.
- Aucun participant masculin n’a vécu ou été témoin d’intimidation ou de harcèlement liés au sexe.
- Les entrevues menées auprès des participants ont permis de cerner six grands thèmes liés aux différences entre les sexes :
- Discrimination
- Harcèlement sexuel
- Maternité et congé parental
- Identité
- Qualités féminines stéréotypées
- Masculinité hégémonique (une hiérarchie basée sur la masculinité).
- Discrimination :
- On a signalé de la discrimination sexiste, apparente ou cachée, de la part de collègues et de supérieurs.
- Les participantes parlent de deux poids, deux mesures dans l’évaluation de leurs compétences, ce qui les amène à penser qu’elles doivent en faire plus.
- Les participantes disent être dénigrées, moins respectées, critiquées, jugées plus sévèrement et traitées injustement.
- Les participantes jugent qu’elles gravissent les échelons plus lentement. Certaines ont choisi de ne pas occuper de grades supérieurs en raison d’expériences de discrimination.
- Les femmes disent que leurs collègues masculins n’étaient généralement pas au courant de ces disparités.
- Harcèlement sexuel
- Les participantes évoquent des comportements de harcèlement de la part de leurs pairs et de leurs supérieurs, allant des blagues déplacées aux contacts sexuels non désirés.
- Seules les femmes signalent subir atteinte à leur réputation, notamment en faisant l’objet de rumeurs de liaisons ou de commentaires sexuels déplacés.
- Maternité et congé parental :
- Les femmes disent que leur avancement est entravé par la maternité et leur lourde charge familiale.
- Le congé parental n’est pas encouragé.
- Les femmes ne pouvant suspendre leurs cotisations au programme de retraite et d’avantages sociaux pendant un congé, certaines jugent ne pas avoir les moyens d’avoir un autre enfant.
- Identité:
- En entrevue, les hommes se décrivent en termes de carrière et de tâches, tandis que pour les femmes ces éléments s’inscrivent dans un plan plus global.
- Tous les participants s’entendent pour dire qu’il est difficile de se détacher de leur rôle d’agent de police lorsqu’ils ne sont pas en service. Ce sentiment est plus marqué chez les hommes qui par ailleurs disent devoir être soumis à des normes de conduite plus élevées même en tant que civils.
- Qualités féminines stéréotypées :
- Les femmes se décrivent comme étant plus analytiques, de bonne écoute, maternelles, gentilles, enveloppantes, de bonnes communicatrices et plus douces.
- Plusieurs estiment ces qualités profitables au travail de police.
- Les femmes croient que ces qualités féminines les destinent à des cas spécifiques comme les agressions sexuelles et le soutien aux jeunes, tandis que les hommes sont plutôt assignés prioritairement à des interventions actives ou dangereuses.
- Certains hommes estiment que ces qualités féminines font des femmes des coéquipiers de choix. D’autres déplorent par contre que ces qualités incitent les femmes à mettre la « compassion » avant le devoir.
- Masculinité hégémonique :
- Les participants indiquent que la masculinité est très valorisée et qu’elle est au cœur même de leurs fonctions.
- Les policiers estiment qu’ils doivent paraître grands, forts, durs et braves.
- Les agentes soulignent que l’on attribue leurs émotions à leur féminité. Elles sont moins prises au sérieux lorsqu’elles manifestent de l’émotion.
- Les policiers signalent qu’afficher plus ouvertement des qualités féminines stéréotypées peut nuire à leur statut social.
Quelles mesures prendre maintenant?
Cette étude a ses limites. En effet, les participants ont choisi de participer de leur plein gré et s’intéressaient donc probablement déjà au sujet; de plus, tous provenaient d’une même province. L’étude a tout de même révélé des différences de genre entre ce que vivent les hommes et les femmes au sein du corps de police. Les participants ont aussi formulé des suggestions pour améliorer les pratiques organisationnelles afin de contrer le sexisme. Parmi ces suggestions on compte les suivantes : addition de personnel, planification des remplacements de congés de maternité, garderie sur place et participation des femmes à la planification et à l’élaboration des politiques. Les participants masculins disent n’avoir jamais été témoins de discrimination ou de harcèlement, contrairement aux femmes, qui toutes disent en avoir été victimes. Cette disparité laisse entrevoir des lacunes dans la formation des policiers. Les organisations policières et les écoles ou collèges de police devraient sensibiliser les recrues à la discrimination liée au sexe et les encourager à collaborer à l’amélioration du climat en milieu de travail.
La formulation originale de cette étude a été modifiée et abrégée pour ce sommaire de recherche.
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Étude d’origine
Angehrn, A., Fletcher, A. J., & Carleton, R.N. (2021). “Suck it up, buttercup”: Understanding and overcoming gender disparities in policing. International Journal of Environmental Research and Public Health, 18 (7627). https://doi.org/10.3390/ijerph18147627
Sommaire rédigé par E. Kossick, révisé et édité par B. Barootes. et Angehrn, A.